Négociations tarifaires
La revalorisation tarifaire des médecins de famille et de l’enfance est absolument impérative
L'introduction simultanée du TARDOC et des forfaits ambulatoires met en péril le renforcement prévu et nécessaire des soins médicaux de base. Il est clair que les médecins de famille et de l’enfance n’accepteront en aucun cas les dommages collatéraux résultant de l’introduction du tarif au 1er janvier 2026. La revalorisation des cabinets de médecine de famille et de l’enfance dans le tarif doit réussir. Maintenant et sans conditions !
Nous le disons franchement : nous sommes très inquiets. L'introduction simultanée du TARDOC et des forfaits pour les prestations fournies en ambulatoire présentent quelques défis. Premièrement, il n'est jamais possible de savoir avec certitude quel sera l'impact financier d'une nouvelle structure tarifaire lorsqu'elle sera effectivement appliquée au quotidien. Deuxièmement, la phase d'introduction est soumise à la règle de la neutralité des coûts. Le gâteau ne s'agrandit donc pas, la question pertinente est donc la suivante : qui reçoit des parts et de quelle taille ? Là encore, il est impossible de le prédire avec certitude. Troisièmement, le TARDOC initial est complété par des forfaits ambulatoires dans des délais très serrés. Il en résulte une incertitude considérable quant aux effets de la réforme tarifaire sur l'ensemble du financement dans le domaine ambulatoire - et la crainte, pour nous médecins de premier recours, de dommages collatéraux (même involontaires).
Depuis des années, on nous assure qu’un nouveau système tarifaire ambulatoire devrait renforcer les médecins de famille et de l’enfance. Nous sommes heureux du large soutien politique reçu et surtout de celui de la population. Pour rappel : en 2014, 88 % des personnes interrogées ont dit « oui » au renforcement de la médecine de famille et de l’enfance !
La nécessité d’agir est connue depuis de nombreuses années et devient de plus en plus évidente. On atteste la pénurie de médecins de famille et de l’enfance. Néanmoins, certains signes indiquent actuellement que la revalorisation visée des soins médicaux ambulatoires de base pourrait être compromise par les nombreuses interventions de dernière minute apportées à la structure globale du TARDOC.
L'une des principales raisons est, comme nous l'avons mentionné, les forfaits qui, à la demande du Conseil fédéral ou du Parlement, doivent maintenant être fusionnés avec le TARDOC dans des délais très serrés.
Concepts indifférenciés de neutralité des coûts
Bien qu’aucun forfait ne soit prévu pour le travail des médecins de famille et de l’enfance en soi, le nouveau système de forfaits représente donc un grand risque pour nos cabinets. Pourquoi ? Parce que la neutralité des coûts demandée exige que le passage à un nouveau système tarifaire n’entraîne globalement pas de coûts supplémentaires. Dans le cadre des concepts de neutralité des coûts élaborés sous une pression intense des délais, il sera difficile d’effectuer des analyses et des ajustements ciblés. Il n'y a pas de preuve, ni de certitude que les prestations des médecins de famille et des pédiatres soient suffisamment protégées ou renforcées.
Si d'éventuelles augmentations globales des coûts dans le domaine ambulatoire ne peuvent pas être suffisamment identifiées et ne peuvent pas encore être corrigées en fonction du principe de causalité, des baisses de tarifs non ciblées risquent de toucher tout simplement l’ensemble de la population.
Il est donc possible que des forfaits excessifs dans le domaine ambulatoire hospitalier entraînent une augmentation des coûts, dont nous devrons ensuite financer la correction par des baisses tarifaires, justement dans les cabinets de médecins de famille et de l’enfance. Si cela se produit, les cabinets de médecine de famille et de l’enfance, déjà en difficulté économique, subiront des dommages vitaux.
Nouveau tarif : grandes opportunités soudainement remplacées par de gros risques
La mise en place d’un nouveau tarif ambulatoire constitue une opportunité d’enfin corriger un déséquilibre existant depuis deux décennies et de revaloriser le tarif des médecins de famille et de l’enfance. Pour rappel : dans le système TARMED en vigueur, les prestations médicales les mieux évaluées ont deux fois et demie plus de valeur que les prestations des médecins de famille et de l’enfance. Ceci est flagrant et tous nos efforts pour promouvoir la relève et lutter contre la pénurie de médecins de famille seront vains si cette inégalité de traitement n’est pas corrigée. Le fait est toutefois qu’au terme des négociations, sous la pression du temps et après de nombreuses interventions arbitraires dans un système bienfaisant comme le TARDOC, la rémunération des prestations de médecine de famille et de l’enfance ne s’améliore pas, voire se détériore dans le pire des cas. Cette crainte est pour le moment très réelle. Sauf si l'on parvient à anticiper les éventuels effets négatifs sur les services de base, à les surveiller et, si nécessaire, à intervenir de manière ciblée et immédiate. C'est de cette certitude dont nous avons besoin.
Ces dernières années, les médecins de famille et de l’enfance ont très bien écouté lorsqu’il était question de renforcer des soins de base rentables et proches de la patientèle. Un mandat donné par la LAMal et la votation sur l'initiative des médecins de famille par la population. La situation économique de nombreux cabinets s’est encore nettement détériorée durant les années de renchérissement. Il n’y a donc aucun calcul politique derrière le fait que nous répétons sans cesse que de nombreux cabinets sont en grande difficulté économique. Non, c’est ce que notre base dans toutes les régions de Suisse nous donne à entendre et à voir.
Un mécontentement croissant
La grande majorité de nos collègues sont restés tranquilles jusqu’à présent et ont patiemment attendu les améliorations annoncées par toutes les parties avec le TARDOC. Cela va changer. Le renchérissement de ces dernières années, l’augmentation des coûts de personnel, les exigences réglementaires croissantes ou les coûts d’investissement en faveur du progrès technologique et électronique, tout cela met la situation économique de nos cabinets – et la patience de nos collègues – à rude épreuve. Il est donc absolument impératif que le renforcement substantiel de la médecine de famille et de l’enfance réussisse maintenant. Une chose est sûre : les médecins de famille et de l’enfance ne seront en aucun cas disposés à accepter des dommages collatéraux liés à l’introduction du tarif. Et nous entendons dire que de nombreux collègues sont désormais disposés à exprimer clairement leur mécontentement si les discours prononcés pendant des années ne sont pas suivis d’effets.
Les belles paroles ne suffisent plus – il faut plus d’argent, maintenant !
Avec le changement de tarif, le renforcement des soins de base apportés par la médecine de famille et de l’enfance dans les cabinets, envisagé depuis longtemps, doit enfin devenir une réalité. Il faut un plus substantiel par rapport au statu quo qui soit non fictif, sans points tarifaires et sans facteurs. Il doit être dans la caisse, en espèces sonnantes et trébuchantes. En effet, nous devons payer les loyers et les salaires, et garantir une part essentielle des soins de santé de la population. Avec l’introduction du TARMED, les médecins de famille et de l’enfance ont subi des pertes massives. La correction rapide envisagée à l’époque n’a jamais eu lieu. Le supplément pour prestations de médecine de famille et la suppression des valeurs intrinsèques ont certes apporté une légère revalorisation, mais celle-ci a été anéantie par le durcissement des limitations de facturation inappropriées. Les hausses de coûts accumulées au cours des 20 dernières années ont encore aggravé la situation. Des calculs partent du principe que les médecins de famille et de l’enfance ont subi des pertes réelles de 12 à 15 % avec et depuis l’introduction du TARMED. C’est pourquoi de nombreux cabinets atteignent aujourd’hui leurs limites économiques, et ce, bien qu’ils s’occupent d’un nombre croissant de patientes et de patients.
L’application différenciée de la neutralité des coûts est une nécessité absolue !
La neutralité des coûts exigée par le Conseil fédéral lors de l’introduction du tarif et le monitoring consécutif de l’évolution des coûts représentent un risque important pour le renforcement envisagé des médecins de famille et de l’enfance. La neutralité des coûts ne doit pas empêcher la revalorisation des médecins de famille et de l’enfance ! Il faut donc impérativement une mise en œuvre différenciée des concepts de neutralité des coûts, et un monitoring différencié qui permette d'observer l'évolution des coûts de manière différenciée et, le cas échéant, de corriger de manière ciblée et immédiate les effets négatifs sur les soins de base ambulatoires en cabinet. A cet égard, nous avons besoin de certitudes dès l'introduction du nouveau tarif ! Dans le cas contraire, les médecins de famille et de l’enfance risquent de subir des hausses de coûts excessives, par exemple dans le domaine hospitalier ambulatoire.
Pas de surcroît de bureaucratie avec le nouveau tarif !
Le nouveau tarif ne doit pas entraîner de nouvelles contraintes administratives. Ces dernières années, on a pu constater que celles-ci avaient fortement augmenté, la bureaucratie nous faisant perdre de plus en plus de temps. Du temps qui nous manque pour travailler avec et auprès des patientes et patients, et qui grève inutilement les coûts de la santé. Premièrement, cela n’est pas judicieux du point de vue économique et de l’économie de la santé, car il s’agit d’une mauvaise allocation des ressources. Deuxièmement, la bureaucratie ne rend pas notre métier et l’installation en cabinet plus attrayants pour la relève, dont nous avons un besoin urgent.
L’assistanat au cabinet médical ne doit pas être entravé !
L’assistanat au cabinet médical est un pilier important de la formation postgraduée des médecins de famille et de l’enfance. Il est prouvé que la période d’assistanat dans les cabinets de médecins de famille et de l’enfance est l’une des mesures les plus efficaces pour la promotion de la relève et devient de plus en plus importante et pertinente avec l’encouragement des soins ambulatoires. Les prestations des médecins-assistants en formation postgraduée doivent impérativement pouvoir être facturées par les cabinets.
Pas de forfaits dans les cabinets de médecins de famille !
Les forfaits sont sur toutes les lèvres et on en attend beaucoup lorsqu’il s’agit de réduire les coûts. Dans quelques cas exceptionnels, ils peuvent être judicieux et efficaces. Beaucoup ne le sont pas. Et dans le quotidien des médecins de famille et de l’enfance, ils ne sont tout simplement pas une option. Les patientes et patients dans les cabinets de médecins de famille et de l’enfance, leurs problèmes de santé, le temps consacré à l’anamnèse et au diagnostic, les conseils et les thérapies ainsi que l’environnement social sont tous tellement différents qu’une tarification forfaitaire appropriée des prestations médicales dans les cabinets de médecins de premier recours est impensable. Les assurances l’ont également compris, pour le moment.