Tribune de recherche

Coronavirus et recherche : une nouvelle pandémie.

Trouver un article de recherche pertinent à commenter, en lien avec le Coronavirus et la médecine de famille ?

Trouver un article de recherche pertinent à commenter, en lien avec le Coronavirus et la médecine de famille ? une gageure. Une rapide interrogation sur Google Scholar avec ces 2 items donne plus de 60'000 résultats à mi-mai, alors que ce virus n’est connu que depuis moins de 6 mois. Ahurissant, quand on sait le temps habituellement long de la science. Une pandémie de publications donc, des origines du virus jusqu’à ses complications, en passant par ses possibles traitements et aux mesures à prendre pour s’en protéger à titre individuel ou populationnel.

Mais quand on cherche des réponses robustes, fondées sur les preuves étayant les recommandations fortes de l’Evidence-based medicine EBM, on en trouve aucune sur des sites reconnus d’ordinaire pour leur sérieux et leur rigueur comme McMaster (1) ou Cochrane (2). Toujours les mêmes conclusions : niveau de preuve insuffisant, biais méthodologique, série trop petite pour une puissance statistiquement significative.

Une image bâclée de la science ? Des publications hâtives pour répondre à l’urgence de l’épidémie et combler rapidement les attentes des politiques ou de la population ? On voit même des scientifiques auréolés de leurs titres passés se positionner en gourous de la chloroquine et se faire récupérer par des complotistes de tous bords au détriment de toute raison critique. Avions-nous tellement estimé la science que nous l’avons crue capable de résoudre tous nos questionnements ? Un tout petit virus… et tout l’édifice de nos certitudes est ébranlé.

Que faire alors ? Sacrifier la validité scientifique sur l’autel de l’urgence et prêter foi à la première publication venue parce qu’elle est basée sur l’éminence ? Ce serait un beau retour à l’arbitraire avec son corollaire, l’absolutisme et ses dérives. Non ! 

Interrogeons-nous : si les études sur le Covid-19 sont encore lacunaires, n’est-ce pas plutôt faute de temps, de rigueur et de collaboration ? Un système de recherche à remettre en cause ? Trop d’équipes isolées sont lancées dans une course effrénée et narcissique à la publication, à la reconnaissance, à la gloire – prix Nobel assuré pour le premier traitement ou vaccin efficace contre le coronavirus.

En attendant des résultats probants, soyons donc prudents, primum non nocere. Acceptons de soigner à défaut de guérir. Retrouvons l’humilité du temps long de la nature et restons critiques.

L’orgueil des humains a de tous temps été puni par les dieux que nous croyions devenir ...

1.https://plus.mcmaster.ca/COVID-19/
2. https://www.cochranelibrary.com/